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👑 Napoléon Ier : Du Sacre Impérial à la Chute du Premier Empire (1804–1814)
L’accession de Napoléon Bonaparte au titre d’Empereur des Français marque le début du Premier Empire (1804-1815). Cet événement, concrétisé par une cérémonie somptueuse et lourdement chargée en symboles, répondait à une nécessité politique de stabiliser la France après les turbulences révolutionnaires. Le règne de Napoléon Ier fut caractérisé par des réformes domestiques majeures, une politique économique protectionniste, et une série impressionnante de campagnes militaires qui portèrent l’Empire à son apogée avant de conduire à son effondrement dramatique.
I. Le Couronnement Impérial : Le 2 Décembre 1804 ✨
Le couronnement de Napoléon Ier a lieu le 2 décembre 1804. Cette journée est immortalisée par la toile de Jacques-Louis David, Le Sacre de Napoléon (1807), qui saisit le moment précis où Napoléon s’apprête à couronner l’impératrice Joséphine, prenant la couronne impériale des mains du pape Pie VII.
1.1. La Justification Politique de l’Hérédité Impériale
Contrairement à une prise de pouvoir arbitraire, l’Empire est né à la demande du Sénat. Initialement, l’instauration de l’Empire était perçue comme un moyen de « protéger » la République. L’historien américain Steven Englund partage l’idée selon laquelle, si le Consulat s’était effondré, l’ordre public aurait été brisé.
L’Empire, en tant qu’institution héréditaire, avait pour but d’assurer la pérennité des valeurs républicaines. L’hérédité du titre était censée prémunir le pays des bouleversements et de la perte des acquis révolutionnaires, même en cas de décès de Napoléon Bonaparte. Cette double identité est attestée par les monnaies impériales, qui portaient la mention « Napoléon Empereur – République française » jusqu’en 1808.
Des observateurs contemporains, comme la comtesse de Rémusat, notent que les « hommes fatigués des troubles révolutionnaires » voyaient en Bonaparte celui qui les « sauverait des dangers d’une anarchie tumultueuse » et qui leur apporterait « le repos sous la domination d’un maître habile ».
1.2. Une Création Symbolique : Hériter de Rome et de Charlemagne 🏛️
Le passage de la République à l’Empire nécessitait l’établissement d’une tradition impériale inexistante auparavant, ce qui a exigé la création de nouvelles armoiries et d’objets symboliques. Napoléon, désireux de se présenter comme un rassembleur, a choisi d’associer à son règne des images historiques puissantes, représentant la France et les pouvoirs forts européens.
Les symboles utilisés lors du sacre étaient fortement codifiés et chargés de références historiques :
- L’Aigle Impériale : Elle est choisie en référence aux aigles romaines portées par les légions. Elle est également le symbole de Charlemagne, adoptant l’aspect de l’aigle éployée.
- La Pourpre de l’Imperium : La couleur rouge du manteau impérial est une référence directe à la pourpre de l’imperium romain. Par ces choix, Napoléon se posait en héritier de l’Empire romain et de Charlemagne.
- Les Abeilles : Ces broches, retrouvées dans des tombeaux de cette époque, sont censées rappeler la dynastie des Mérovingiens. Leur disposition sur les armoiries et le manteau impérial visait à évoquer les fleurs de lys des Capétiens.
- La Main de Justice : Utilisée par les Capétiens lors des sacres royaux, son usage par l’Empereur signalait qu’il était l’héritier de leur pouvoir.
En associant ces différents symboles, Napoléon cherchait à montrer qu’il était le fondateur de la « quatrième dynastie », celle des Bonaparte, venant après les Mérovingiens, les Carolingiens et les Capétiens.
Lors de la cérémonie, Napoléon tenait un moment le globe de Charlemagne et portait la couronne de ce même empereur, bien que ces deux éléments aient été forgés de toutes pièces pour l’occasion. Son épée et son sceptre, dits « de Charlemagne », avaient en réalité été utilisés par les Valois puis les Bourbons lors de leurs propres sacres royaux depuis plusieurs siècles.
II. Le Rapprochement Calculé avec l’Église et la Légitimité Divine ✝️
La présence du pape Pie VII au sacre était un élément crucial de la stratégie de légitimation de Napoléon, notamment après la signature du Concordat de 1801.
2.1. Un Souverain au-Dessus des Rois
Le Concordat, signé par le Premier consul, reconnaissait le catholicisme comme la religion « de la majorité des Français », sans en faire la religion d’État. Les prêtres recevaient désormais un traitement de la part de l’État.
Afin d’affirmer sa puissance, Napoléon rompt avec la tradition : il ne se rend pas à Rome pour être sacré, comme l’avaient fait Charlemagne et les empereurs germaniques jusqu’au XVe siècle. Au contraire, c’est le pape Pie VII qui fut contraint de venir à Paris. L’accueil que Napoléon lui réserva en forêt de Fontainebleau, à cheval et en habit de chasse, fut mis en scène pour faire croire au caractère fortuit de leur rencontre, minimisant ainsi l’importance protocolaire du souverain pontife.
Le rapprochement avec l’Église était avant tout un calcul politique de la part de l’Empereur. Le sacre religieux offrait une valeur morale aux yeux des catholiques et une valeur symbolique, rappelant le couronnement pontifical des empereurs germaniques.
2.2. Le Message aux Puissances Européennes
La cérémonie plaçait Napoléon à l’égal, voire au-dessus des rois européens. Il se positionnait comme le successeur de Charlemagne et des empereurs de la Rome antique. La présence du pape conférait à l’Empire une dimension morale et légitime supplémentaire.
L’Empire n’était plus seulement le produit d’une révolution ; il devenait un couronnement divin, que les autres souverains européens ne pouvaient égaler. Napoléon se plaçait au même niveau que le souverain du Saint-Empire romain germanique, dans l’optique de le dépasser pour s’imposer comme l’unique empereur en Europe. François II, ayant anticipé cette menace, avait d’ailleurs décrété que l’Autriche, alors archiduché, deviendrait aussi un empire après la proclamation de l’Empire français.
La présence de Pie VII était donc surtout un message politique adressé aux pays européens plutôt qu’une simple profession de foi catholique de la part de Napoléon. D’ailleurs, l’Empereur manifesta plus tard son peu de sensibilité au sort du pape en le retenant prisonnier à Fontainebleau. Dans son ambition d’affirmer la puissance spirituelle de la France, Napoléon a même envisagé de transférer la résidence papale de Rome à Paris, avant d’abandonner cette idée.
Un an après son sacre impérial, le 26 mai 1805, Napoléon se couronne également roi d’Italie à Milan.
III. La Politique Intérieure : Réformes et Économie 📈
Le règne impérial s’est distingué par l’institution de nombreuses réformes dans les domaines sociétal et économique.
3.1. Le Code Napoléon et les Fondations Légales
L’œuvre juridique la plus emblématique du règne est l’institution du Code civil, également appelé « Code Napoléon », promulgué le 21 mars 1804 (30 ventôse an XII). Ce code reprenait des éléments de la Coutume de Paris et du droit écrit du Sud de la France, tout en protégeant le droit des contrats et des obligations.
3.2. Encouragement de l’Industrie
Sur le plan économique, Napoléon souhaitait particulièrement encourager l’industrie. Il a notamment poussé au développement des usines de coton, installées dans les biens nationaux, stimulées par le besoin de textiles pour habiller les armées durant les guerres.
Cependant, ces projets industriels ont été fortement affectés par les conséquences du blocus continental. Ce décret napoléonien prétendait interdire l’accès au continent européen à tout navire ayant fait escale dans un port anglais.
L’application de ce blocus a entraîné des complications : par exemple, le Portugal, resté neutre, permettait l’importation de coton brésilien via des négociants français. L’invasion du Portugal en 1807 par l’armée française de 30 000 hommes commandée par Jean-Andoche Junot poussa la famille royale portugaise à émigrer au Brésil. Cette émigration déclencha des mesures de rétorsion contre la France, la privant de l’accès au coton brésilien.
3.3. Soutien aux Arts Impériaux
Napoléon a également soutenu les industries d’art. En 1804, il recrée le Garde-Meuble, l’institution responsable de l’ameublement des palais impériaux. Par son intermédiaire, il faisait travailler les ébénistes et menuisiers parisiens, auxquels il prêta une attention particulière lors des crises économiques de 1807 et de 1810-1811. Il est également à l’origine de la construction de la Bourse de Paris et de ses principales réglementations.
IV. L’Apogée Militaire : Victoires et Expansion (1805–1812) ⚔️
En 1804, la priorité n’était pas aux vastes conquêtes, mais à la diplomatie. Dès le 2 janvier 1805, Napoléon proposa la paix au roi de Grande-Bretagne George III, mais celui-ci refusa catégoriquement.
4.1. Trafalgar et la Troisième Coalition
Convaincu que seule la neutralisation du Royaume-Uni permettrait une paix définitive, Napoléon conçut un plan d’invasion. Cependant, cette ambition s’effondra définitivement à la bataille de Trafalgar. La flotte franco-espagnole fut détruite par celle de l’amiral Nelson, assurant au Royaume-Uni la domination des mers pour le siècle à venir.
Face à l’échec naval, l’Empereur se tourna vers le continent. En 1805, la Troisième Coalition se forma contre la France. Napoléon déplaça la Grande Armée, qui supervisait initialement les préparatifs d’invasion du Royaume-Uni à Boulogne, vers l’Autriche. Il remporta une victoire éclatante contre l’Autriche et la Russie le 2 décembre 1805 à la bataille d’Austerlitz, également nommée « bataille des Trois-Empereurs ».
4.2. La Quatrième Coalition et la Naissance de la Noblesse d’Empire
En 1806, la Prusse déclencha un nouveau conflit. La campagne menée par Napoléon fut impressionnante de rapidité, surnommée « l’Esprit en marche » par Hegel. L’armée prussienne fut balayée à la bataille d’Iéna, complétée par la victoire décisive du Maréchal Davout à Auerstaedt, où ses 30 000 hommes vainquirent 63 500 Prussiens.
L’année suivante, Napoléon traversa la Pologne et remporta une victoire contre les Russes à Friedland. La diplomatie scella ces succès : à Tilsit, au milieu du Niémen, Napoléon signa un traité avec le tsar Alexandre Ier qui procéda à la division de l’Europe entre les deux puissances.
Ces succès militaires étaient le fruit d’une nouvelle doctrine : Napoléon, bien que formé par les maîtres de l’Ancien Régime, brisa les conceptions militaires traditionnelles. Il ne s’agissait plus de livrer une guerre de siège avec 30 000 à 50 000 hommes, mais de rechercher la bataille décisive, engageant souvent plus de 100 000 hommes, dans le but d’anéantir l’ennemi plutôt que de simplement rester maître du champ de bataille.
Pour récompenser et fidéliser ses officiers, Napoléon créa la noblesse d’Empire en 1808. Bientôt, ses maréchaux et généraux portèrent des titres prestigieux tels que comte d’Empire, duc d’Auerstaedt, ou roi de Naples.
4.3. Le Congrès d’Erfurt et la Trahison
En 1808, du 27 septembre au 14 octobre, Napoléon rencontra à nouveau Alexandre Ier à Erfurt. L’objectif était de forger un nouveau traité visant à unir les deux empires contre l’Autriche, qui menaçait de reprendre la guerre contre la France.
Le tsar préféra renouveler l’alliance forgée à Tilsit, mais refusa une union formelle contre l’Autriche. Ce fut un échec pour Napoléon, qui découvrit alors la trahison de Talleyrand, lequel avait conseillé au tsar de résister aux demandes françaises, même s’il était séduit par Napoléon.
V. Le « Nœud Fatal » : La Guerre d’Espagne et le Grand Empire 🇪🇸
L’ambition d’imposer le blocus continental au Royaume-Uni conduisit Napoléon à s’engager dans la péninsule Ibérique, un conflit qui s’avéra catastrophique pour l’Empire.
5.1. L’Invasion de la Péninsule Ibérique
Pour asphyxier le commerce britannique, le décret de Berlin du 21 novembre 1806 institua le blocus continental. Le Portugal, allié historique des Britanniques, était resté neutre. Après des pressions diplomatiques, Napoléon menaça le Portugal d’invasion s’il n’appliquait pas le blocus.
L’invasion française du Portugal eut lieu en novembre 1807, commandée par le général Junot. Conformément au traité de Fontainebleau, les troupes françaises s’installèrent également en Espagne, alliée de circonstance, pour soutenir l’opération. Le gouvernement portugais et la cour se réfugièrent à Rio de Janeiro, sous la protection de la flotte britannique.
5.2. Le Changement Dynastique et l’Insurrection Espagnole
À l’automne 1807, des tensions internes secouaient la monarchie espagnole entre le roi Charles IV et son fils Ferdinand. Napoléon, considérant l’Espagne comme un allié décevant dans la guerre contre la Grande-Bretagne, jugea la situation mûre pour un changement dynastique.
Après le soulèvement d’Aranjuez en mars 1808, qui força Charles IV à abdiquer en faveur de Ferdinand, Napoléon s’érigea en arbitre de la famille des Bourbons d’Espagne. Il profita de leur querelle pour leur imposer une abdication complète à Bayonne.
Napoléon installa son frère Joseph Bonaparte sur le trône d’Espagne (Joseph fut remplacé à Naples par Joachim Murat, époux de Caroline Bonaparte). Ce geste provoqua le soulèvement immédiat de la population espagnole, marquant le début d’une guerre de six ans : la Guerre d’Espagne.
L’armée britannique débarqua au Portugal, et les Français subirent de sérieux revers dès l’été 1808 (comme la capitulation de Baylen et la bataille de Vimeiro). Avec l’aide des patriotes espagnols, les Anglo-Portugais repoussèrent progressivement l’armée française hors de la péninsule Ibérique.
Napoléon reconnut ultérieurement cette intervention comme une grave erreur : « Cette malheureuse guerre m’a perdu ; toutes les circonstances de mes désastres se rattachent à ce nœud fatal ». Il estimait que cette guerre avait compliqué ses embarras, divisé ses forces, et détruit sa moralité en Europe. Il critiqua sévèrement son frère Joseph, qu’il jugeait incapable de maintenir l’ordre et d’être chef d’État.
5.3. La Cinquième Coalition et la Quête d’un Héritier
Alors que les meilleures troupes étaient embourbées en Espagne, l’empire d’Autriche attaqua une nouvelle fois la France en Allemagne et en Italie (Cinquième Coalition). La bataille d’Essling vit le maréchal Lannes, ami de Napoléon, périr, et représenta le premier grand revers de l’Empereur. Cependant, l’armée autrichienne fut finalement vaincue à la bataille de Wagram en juillet 1809.
L’année 1809 fut marquée par un sentiment croissant de vulnérabilité du régime. Napoléon fut légèrement blessé au pied à Ratisbonne en avril 1809, et échappa à une tentative d’assassinat par Frédéric Staps à Schönbrunn en octobre 1809. Ces événements soulignèrent la nécessité impérieuse d’assurer un héritier direct à l’Empire.
Le divorce avec Joséphine devint inéluctable. Napoléon savait que la stérilité du couple ne venait pas de lui, ayant déjà eu des liaisons donnant naissance à Léon (1806) et Alexandre Walewski (né en 1810).
Quelques mois après la paix de Schönbrunn, Napoléon épousa l’archiduchesse Marie-Louise d’Autriche, la fille aînée de son dernier ennemi, le 2 avril 1810. Elle lui donna un fils le 20 mars 1811, baptisé « Napoléon François Charles Joseph » et titré « roi de Rome ».
VI. Le Grand Empire à son Zénith (1812) 🗺️
Au début de l’année 1812, l’Empire atteignit l’apogée de son extension territoriale. Le « Grand Empire » comptait alors 134 départements, s’étendant de Hambourg à Rome et Barcelone, incluant également les Provinces illyriennes. Sa population était estimée à 70 millions d’habitants, bien que seulement 30 millions appartenaient à la France de 1793.
L’Empire s’appuyait sur plusieurs États vassaux :
- Le royaume d’Italie.
- Le royaume de Naples.
- Le royaume d’Espagne.
- La confédération du Rhin (incluant le duché de Varsovie).
- La Confédération suisse.
- D’autres entités comme la ville libre de Dantzig et Corfou.
Malgré cette domination continentale, les colonies outre-mer françaises étaient déjà tombées sous le contrôle des Britanniques.
VII. Le Début du Déclin : La Catastrophe Russe (1812) 🥶
La rupture avec la Russie marque le tournant décisif du règne impérial. Poussé par la noblesse russe acquise aux Britanniques, le tsar Alexandre Ier refusa de coopérer avec Napoléon pour porter le coup final au Royaume-Uni.
7.1. L’Invasion et la Terre Brûlée
Croyant la guerre inévitable, Napoléon envahit la Russie en 1812. La Grande Armée était gigantesque, forte de 600 000 hommes, incluant des contingents autrichiens, allemands et italiens.
Les Russes, sous la direction de Koutouzov, adoptèrent la stratégie de la « terre brûlée », reculant sans cesse devant les troupes françaises. La seule confrontation majeure fut la bataille de la Moskova le 12 septembre, qui fut indécise. Bien que les Russes abandonnèrent le terrain, les pertes furent presque équivalentes dans les deux camps.
7.2. Moscou et la Retraite Hivernale
Dès le lendemain de l’entrée des troupes françaises à Moscou, les Russes mirent le feu à la ville. Napoléon s’attarda à Moscou dans l’espoir qu’Alexandre Ier fasse une démarche de paix.
Lorsqu’il donna finalement le signal de la retraite, l’hiver était dangereusement proche. La Grande Armée entama alors une course désespérée vers l’Allemagne à travers les régions dévastées qu’elle avait traversées à l’aller. Le froid, la neige et les Cosaques provoquèrent des pertes effroyables. Sur les 600 000 hommes engagés, seules quelques dizaines de milliers purent franchir la Bérézina. La Grande Armée était détruite.
VIII. La Chute Finale et la Première Abdication (1813–1814) ⬇️
Encouragés par le dramatique échec en Russie, les souverains européens reprirent les armes contre la France.
8.1. La Bataille des Nations
Malgré deux victoires remportées par Napoléon en Allemagne (Lutzen et Bautzen), la coalition se renforça. La défaite décisive survint à la bataille de Leipzig, également appelée « bataille des Nations ». 180 000 Français affrontèrent 300 000 alliés (russes, autrichiens, prussiens, suédois). La situation fut aggravée par la trahison d’une partie des alliés allemands de Napoléon sur le champ de bataille même. La défaite entraîna la mort du maréchal Poniatowski et environ 100 000 morts et blessés au total.
8.2. La Campagne de France et l’Abdication
En 1814, l’alliance entre le Royaume-Uni, l’Empire russe, le royaume de Prusse et l’empire d’Autriche se concrétisa pour l’invasion de la France.
Napoléon, à la tête d’une armée de jeunes recrues inexpérimentées (surnommées les « Marie-Louise »), remporta une série de victoires (Champaubert, Montmirail, etc.). Cependant, Paris tomba le 31 mars. Les maréchaux forcèrent l’Empereur à abdiquer.
Napoléon souhaitait abdiquer en faveur de son fils (Napoléon II), mais les puissances alliées exigèrent une abdication inconditionnelle, qu’il signa le 6 avril 1814.
8.3. Tentative de Suicide et Exil à l’Île d’Elbe
Dans la nuit du 12 au 13 avril, craignant d’être séparé de Marie-Louise et de son fils par les Alliés, Napoléon décida de se suicider par empoisonnement. Il est longtemps cru qu’il avait absorbé de l’opium dilué. Il fit appeler Armand de Caulaincourt pour dicter ses dernières volontés.
L’Empereur se plaignit du lent effet de la substance. Il souffrit de nausées de plus en plus violentes et se mit à vomir. Le docteur Alexandre-Urbain Yvan refusa de lui administrer une dose supplémentaire de poison et quitta les lieux. Alors que Napoléon affirmait à Caulaincourt qu’il préférait mourir plutôt que de signer le traité, les effets du poison se dissipèrent, lui permettant de reprendre ses activités.
Déchu par le Sénat le 3 avril, Napoléon fut exilé à l’île d’Elbe selon les termes du traité de Fontainebleau, signé le 11 avril. Il conserva le titre d’Empereur mais ne régna que sur cette petite île.
Durant son convoi de Fontainebleau vers la Méditerranée, il traversa des villages provençaux royalistes qui le conspuèrent. Il risqua même d’être lynché à Orgon, ce qui l’obligea à enfiler un uniforme autrichien pour se déguiser et éviter d’être reconnu.
IX. Conclusion : Le Style et l’Héritage Impérial 🧐
Durant son règne en tant qu’Empereur, Napoléon adopta un style vestimentaire austère et distinctif, se démarquant de la mode. Le bicorne en feutre noir, sans galon ni plumet, et l’attitude consistant à passer sa main droite dans le parement de sa redingote grise recouvrant l’habit militaire devinrent des éléments essentiels de la propagande napoléonienne, incarnant l’homme à lui seul par une sorte de synecdoque.
L’héritage du règne de Napoléon Ier est marqué par :
- L’établissement d’une nouvelle légitimité impériale fondée sur l’héritage romain et carolingien.
- La mise en place de structures légales durables, dont le Code Civil.
- Une politique économique visant à encourager l’industrie nationale (coton, arts).
- Une série de victoires militaires spectaculaires (Austerlitz, Iéna) qui menèrent le « Grand Empire » à dominer la majeure partie de l’Europe continentale en 1812.
- Des erreurs stratégiques majeures, notamment la Guerre d’Espagne, que l’Empereur reconnut comme le « nœud fatal » de ses désastres.
- L’effondrement causé par la campagne de Russie et la défaite décisive de Leipzig, qui mirent fin à la période de gloire impériale en 1814.
Le parcours de Napoléon peut être comparé à un escalier de marbre sculpté par la gloire (le Sacre, Austerlitz) mais qui, à force d’être surchargé de poids (les 600 000 hommes en Russie), finit par se fissurer et s’effondrer sous son propre poids. Les fondations, destinées à protéger la République, se transformèrent en une autocratie dont la pérennité reposait entièrement sur le succès militaire continu de son fondateur.
